Les éblouis

Je suis allé voir le film « les éblouis ». Bien qu’on n’y apprenne rien qu’on ne sache déjà, c’est à voir, car c’est tout de même une problématique et une tare spécifique dans l’histoire du Renouveau charismatique français (bien que ce soit applicable à d’autres communautés, résidentielles ou pas, non charismatiques). A grands traits, voici le scénario :

Une femme mariée un peu dépressive embarque toute sa famille dans une communauté nouvelle charismatique où les états de vie sont mélangés; le film se déroule, ponctué par le chant « si la mer se déchaîne, si le vent souffle fort… »; le berger est un soft-gourou; la famille donne tous ses biens; l’aînée des 4 enfants, adolescente un peu rebelle (12 ans), renifle le problème; pressions diabolisantes, exorcismes sauvages, faux souvenirs induits; elle prend soin admirablement de ses frères et soeurs plus petits; personne n’arrive à ouvrir les yeux des parents; ça se termine mal; mais je ne dévoilerai pas le dénouement…

On frémit lorsqu’on lit dans la Croix que Sarah Suco, réalisatrice qui raconte son histoire, 10 ans de sa vie, dit que la réalité est encore plus dure que ce qu’elle en a montré dans le film… C’est un film très courageux de sa part; puissions-nous lui rendre la pareille en allant le voir.

Il est bon de revisiter l’histoire du courant spirituel dans lequel on a baigné. Ça pose bien des questions sur l’absence de gouvernance lucide de l’épiscopat… notamment des évêques chargés de suivre le Renouveau. J’en ai connu un certain nombre puisque j’ai passé 12 ans à l’instance nationale de communion du Renouveau, en tant que délégué des délégués diocésains au Renouveau; je me mets dans le lot, car, au fond, nous étions ignorants des mécanismes de l’emprise; mais tout de même…).

J’ajoute que je demeure affligé de la façon dont on a éloigné Ephraïm de la gouvernance des Béatitudes, sans cependant rendre public, dans le sérail du Renouveau, si un travail de réflexion sur son influence gourouïsante sur les Béatitudes et l’ensemble du courant du Renouveau, a été fait ou pas, et pourquoi il n’a pas été publié…

Les Frères de Saint Jean en arrivent à être plus clairs en disant ouvertement que M.-D. Philippe, non seulement ne peut être pris comme modèle, mais aussi doit être ignoré quant à son enseignement… Exit la vente des livres dans les boutiques et librairies…

Recension du film dans La Croix

Ni église, ni messe, ni prêtre dans Les Éblouis. Il n’y est question que de communauté, de berger et de partage. Il n’est pas difficile cependant d’y reconnaître une de ces communautés catholiques nées dans les années 1970 dans le sillage du Renouveau charismatique. La comédienne (Discount, Les Invisibles) et réalisatrice Sarah Suco, dont c’est le premier long-métrage, s’est inspirée de sa propre histoire pour faire le récit glaçant d’un embrigadement et décrire les mécanismes à l’œuvre lors de dérives de type sectaire, ainsi que ses conséquences dramatiques pour les enfants à qui on n’a pas demandé leur avis.

Toute la force et la justesse du film sont là. Loin d’en faire un film à thèse, même si le sujet a rarement été abordé par la fiction, Sarah Suco raconte son histoire à hauteur d’enfants. Plus exactement à travers le regard de Camille (formidable Céleste Brunnquell), une jeune fille de 12 ans. Aînée d’une fratrie de quatre enfants, cette préadolescente joyeuse et passionnée de cirque va voir sa vie bouleversée lorsque sa mère, fragilisée par une dépression, décide de rejoindre avec sa famille une communauté qui prône le partage et la solidarité.

De séances d’« exorcisme » en confessions collectives obligatoires, le film montre comment Le Berger qui dirige la communauté resserre insidieusement son emprise sur cette famille, imposant ses règles de vie et

On partage le désarroi de Céleste, sa révolte, puis son déchirement quand elle doit se retourner contre ses parents pour se sauver et protéger ses frères et sœurs.

https://www.la-croix.com/JournalV2/Lemprise-sectaire-commence-sein-famille-2019-11-20-1101061479

contribuant peu à peu à isoler ses membres de leur entourage. Mais c’est sur les pas de Céleste, gamine lumineuse et rebelle, contrainte de mûrir trop vite, que la réalisatrice nous emmène. On partage son désarroi, sa révolte puis son déchirement quand elle doit se retourner contre ses pa- rents pour se sauver et protéger ses frères et sœurs. Un film sensible et juste qui convainc par la qualité de ses interprètes, de Camille Cottin, surprenante dans ce rôle de mère à la dérive à Éric Caravaca en père aimant et naïf, en passant par Jean-Pierre Darroussin dans le rôle faussement bienveillant du Berger.

Céline Rouden

La vidéo

J’ai grandi dans une communauté charismatique religieuse | Le Speech de Sarah Suco