Le Christ, roi de l’univers

Écouter l’homélie du dimanche 23 novembre 2014, solennité du Christ-Roi, à la paroisse Saint Aubin (72).

Homélie du pape François pour le Christ Roi de l’Univers

La liturgie aujourd’hui nous invite à fixer le regard sur Jésus comme Roi de l’Univers. La belle prière de la Préface nous rappelle que son règne est « règne de vérité et de vie, règne de sainteté et de grâce, règne de justice, d’amour et de paix ». Les Lectures que nous avons entendues nous montrent comment Jésus a réalisé son règne ; comment il le réalise au long de l’histoire; et ce qu’il nous demande à nous.

Avant tout, comment Jésus a réalisé son règne : il l’a fait par la proximité et la tendresse envers nous. Il est le Pasteur, dans nous a parlé le prophète Ezéchiel dans la première Lecture (cf. 34,11-12.15-17). Tous ce passage est tissé de verbes qui indiquent l’attention et l’amour du Pasteur envers son troupeau : chercher, passer en revue, rassembler de la dispersion, conduire au pâturage, faire reposer, chercher la brebis perdue, reconduire celle qui est égarée, panser celle qui est blessée, soigner celle qui est malade, prendre soin, paître. Toutes ces attitudes sont devenues réalités en Jésus-Christ : Il est vraiment le “grand Pasteur des brebis et gardien de nos âmes” (cf. He 13,20; 1Pt 2,25).

Et nous qui dans l’Eglise sommes appelés à être pasteurs, nous ne pouvons pas nous distancier de ce modèle, si nous ne voulons pas devenir des mercenaires. A cet égard, le peuple de Dieu possède un flair infaillible pour reconnaitre les bons pasteurs et les distinguer des mercenaires.

Après sa victoire, c’est-à-dire après sa Résurrection, comment Jésus poursuit-il son règne ? L’apôtre Paul, dans la Première Lettre aux Corinthiens, dit : « C’est lui en effet qui doit régner jusqu’au jour où il aura mis sous ses pieds tous ses ennemis. » (15,25). C’est le Père qui peu à peu soumet tout au Fils, et en même temps le Fils soumet tout au Père. Jésus n’est pas un roi à la manière de ce monde : pour Lui régner n’est pas commander, mais obéir au Père, s’en remettre à Lui, pour que s’accomplisse son dessein d’amour et de salut. Ainsi il y a pleine réciprocité entre le Père et le Fils. Le temps du règne du Christ est ce long temps où tout est soumis au Fils et où tout est remis au Père. « Et le dernier ennemi qu’il détruira, c’est la mort. » (1 Cor 15,26). Et à la fin, quand tout aura été remis sous la royauté de Jésus, et quand tout, y compris Jésus lui-même, aura été soumis au Père, Dieu sera tout en tous (cf. 1 Cor 15, 28).

L’Evangile nous dit ce que le règne de Jésus demande de nous : il nous rappelle que la proximité et la tendresse doivent être aussi notre règle de vie, et que c’est sur cela que nous serons jugés, sur ce protocole de vie. C’est la grande parabole du Jugement dernier de Matthieu 25. Le Roi dit : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. Car j’avais faim, et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli ; j’étais nu, et vous m’avez habillé ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi !» (25,34-36). Alors les justes lui répondront : « Seigneur, quand est-ce que nous avons fait tout cela ? » Et il répondra: « Amen, je vous le dis : chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25,40).

Le salut ne commence pas par la confession de la royauté du Christ, mais par l’imitation des œuvres de miséricorde par lesquelles il a réalisé son Royaume. Celui qui les accomplit montre qu’il a accueilli la royauté de Jésus, car il a fait place dans son cœur à la charité de Dieu. Au soir de la vie nous serons jugés sur l’amour, sur la proximité et sur la tendresse envers les frères. De cela dépendra notre entrée ou non dans le royaume de Dieu, notre position d’un côté ou de l’autre. Jésus, par sa victoire, nous a ouvert son royaume, mais il revient à chacun de nous d’y entrer, déjà à partir de cette vie, en nous faisant concrètement proches du frère qui demande du pain, un vêtement, un accueil, de la solidarité…. Et si vraiment nous aimons ce frère ou cette sœur, nous serons poussés à partager avec lui ou avec elle ce que nous avons de plus précieux, c’est-à-dire Jésus même et son Evangile !

Aujourd’hui l’Eglise nous donne pour modèle les nouveaux Saints qui, par leurs œuvres de dévouement généreux à Dieu et aux frères, ont servi le royaume de Dieu chacun dans son domaine, et en sont devenus héritiers. Chacun d’eux a répondu avec une créativité extraordinaire au commandement de l’amour de Dieu et du prochain. Ils se sont dédiés sans compter au service des derniers, en assistant les indigents, les malades, les personnes âgées, les pèlerins. Leur prédilection pour les petits et les pauvres était le reflet et la mesure de leur amour inconditionnel pour Dieu. En effet, ils ont cherché et découvert la charité dans la relation forte et personnelle avec Dieu, de laquelle se dégage le véritable amour pour le prochain. C’est pourquoi, à l’heure du jugement, ils ont entendu cette douce invitation : « Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la création du monde. » (Mt 25,34).

Par le rite de canonisation, nous avons encore une fois confessé le mystère du royaume de Dieu et honoré le Christ Roi, Pasteur plein d’amour pour son troupeau. Que les nouveaux saints, par leur exemple et leur intercession, fassent grandir en nous la joie de cheminer sur la voie de l’Evangile, la décision de le prendre comme la boussole de notre vie. Marchons sur leurs traces, imitons leur foi et leur charité, pour que notre espérance aussi se revête d’immortalité. Ne nous laissons pas distraire par d’autres intérêts terrestres et passagers. Et que notre Mère, Marie, Reine de tous les Saints, nous guide vers le royaume des Cieux. Amen.