Liban – 1915-2015 : Un siècle de souffrances chrétiennes “ Mais que fait l’Occident ? “

SB Younan

C’est dans l’amphithéâtre Jean-Paul II de l’université Kaslik, près de Beyrouth, au Liban, que se sont retrouvés, du 2 au 4 juillet dernier, des universitaires, religieux et laïcs, venus d’Europe et du Proche Orient, pour débattre du génocide syriaque (1).

De l’extermination des chrétiens  arméniens, mais aussi chaldéensassyriens et syriaques en 1915 par les Turcs ottomans, au martyr perpétré, aujourd’hui, par les jihadistes sunnites du daëch, en Irak et en Syrie: Un siècle de calvaire continu.

Une fois de plus, la rencontre a souligné les différences de sensibilité qui existent entre les christianismes oriental et occidental. Ainsi, dès le début du colloque, la communication de l’historien italien Stefano Picciaredda portant sur “la relation entre guerre et génocide” fut un travail remarquable, présenté avec le recul d’un intellectuel, qui n’a pas vécu la tragédie directement, mais l’a parfaitement reconstituée et analysée en s’appuyant sur des recherches pointues et des textes d’experts reconnus.

Les deux interventions qui suivirent, de Mgr Casmoussa et de Mgr Saliba, évêques venus d’Irak et de Syrie tenaient, elles, du témoignage, données par des hommes ayant traversé charnellement le drame. Directement confrontés, l’un et l’autre à la fureur des génocidaires, parlant la même langue qu’eux, ayant vécu dans le même voisinage durant des années. Contrairement à l’universitaire italien, qui enseigne l’Orient dans un pays en paix, les deux religieux orientaux ont joué leur vie, perdu leurs terres natales, et souffrent aujourd’hui dans leur chair d’un exil forcé.

Si le recul et l’objectivité sont à la portée des orientalistes occidentaux, il reste bien difficile aux chrétiens d’Orient de rendre compte de cette histoire avec la même neutralité.

Il fallait juste tendre l’oreille dans les moments de pause ou entendre les questions posées aux intervenants pour se rendre à l’évidence. “Le Daëch n’a pas surgi subitement par hasard, il s’inscrit dans l’histoire de l’islam depuis ses origines” affirmait cette enseignante libanaise, à la sortie du colloque. “quelle dialogue pouvons-nous entretenir avec des imams qui refusent toute interprétation des textes coraniques ?” demandait cet orthodoxe syrien, réfugié depuis quelques mois au Liban….”Dans mon village à l’est de la Syrie, les djihadistes ont enlevé 30 chrétiens, dont trois de mes cousins. Depuis six mois, nous sommes sans nouvelles”.

Face au Daëch, les récriminations contre la “passivité occidentale” restèrent majoritaires dans les réactions de l’assistance de Kaslik. A la tête de la délégation syriaque catholique, le Partiarche Ignace III Younan,  ouvrait le ban des doléances  : “ Mais que fait l’Occident ? se demandait sa Béatitude, originaire de Hassaké, une ville syrienne de l’Est menacée par les djihadistes. “Les avions de leur coalition n’ont pas empêché les brigades islamistes d’entrer dans Palmyre. Et de se rendre maître d’une grande partie de la Syrie.”

Luc Balbont, sur don blog, à partir du site de l’Oeuvre d’Orient

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