Justin et ses compagnons

Qui est saint Justin ?

Justin naît aux environs de l’an 100 près de l’antique Sichem, en Samarie, en Terre Sainte ; il chercha longuement la vérité, se rendant en pèlerinage dans les diverses écoles de la tradition philosophique grecque.

Finalement, – comme lui-même le raconte dans les premiers chapitres de son Dialogue avec Tryphon – un mystérieux personnage, un vieillard rencontré sur la plage de la mer, provoqua d’abord en lui une crise, en lui démontrant l’incapacité de l’homme à satisfaire par ses seules forces l’aspiration au divin. Puis il lui indiqua dans les anciens prophètes les personnes vers lesquelles se tourner pour trouver la voie de Dieu et la « véritable philosophie ». En le quittant, le vieillard l’exhorta à la prière, afin que lui soient ouvertes les portes de la lumière.

Le récit reflète l’épisode crucial de la vie de Justin: au terme d’un long itinéraire philosophique de recherche de la vérité, il parvint à la foi chrétienne. Il fonda une école à Rome, où il initiait gratuitement les élèves à la nouvelle religion, considérée comme la véritable philosophie. En celle-ci, en effet, il avait trouvé la vérité et donc l’art de vivre de façon droite. Il fut dénoncé pour cette raison et fut décapité vers 165, sous le règne de Marc Aurèle, l’empereur philosophe auquel Justin lui-même avait adressé l’une de ses Apologies.

Actes du martyre de Justin

Les saints furent arrêtés et conduits au préfet de Rome, nommé Rusticus. Lorsqu’ils comparurent devant le tribunal, celui-ci dit à Justin : « Avant tout, soumets-toi aux dieux et obéis aux empereurs. » Justin répondit : « On ne peut pas nous accuser ou nous condamner parce que nous obéissons aux préceptes de notre sauveur Jésus Christ. »

Le préfet Rusticus : « Quelles doctrines professes-tu ? » Justin : « J’ai entrepris d’apprendre toutes les doctrines, mais j’ai adhéré aux doctrines véritables des chrétiens, bien qu’elles ne plaisent pas à ceux qui sont prisonniers de l’erreur. — Et ces doctrines-là te plaisent, pauvre malheureux ? — Oui, car en les suivant je trouve la vraie croyance. — Quelle est cette croyance ? — Nous vénérons le Dieu des chrétiens ; nous croyons qu’il est unique, créateur et artisan, dès le commencement, de toute la création, de l’univers visible et invisible ; et nous vénérons le Seigneur Jésus Christ, serviteur de Dieu, qui a été annoncé à l’avance par les prophètes comme devant venir au secours de la race des hommes, en messager du salut et maître des belles connaissances. Moi, qui ne suis qu’un homme, j’estime ne pouvoir dire que peu de choses sur sa divinité infinie ; mais je reconnais la puissance des prophètes : ils ont annoncé à l’avance, comme je viens de le dire, qu’il est le Fils de Dieu. Sache donc que les prophètes ont prédit, par une inspiration céleste, son avènement parmi les hommes. » ~

Le préfet Rusticus reprit : « Bref, tu es chrétien ? — Oui, je suis chrétien. » ~

Rusticus : « Écoute, toi que l’on dit savant et qui t’imagines posséder les doctrines véritables : Si tu es fouetté puis décapité, crois-tu que tu vas monter au ciel ? — J’espère que j’y aurai ma demeure, si je supporte tout cela. Je sais que, pour tous ceux qui auront bien vécu, la récompense de Dieu est réservée jusqu’à la destruction de l’univers. — Tu supposes donc que tu monteras au ciel pour recevoir de belles récompenses ? — Je ne le suppose pas, mais je le sais avec certitude et j’en suis convaincu. »

Le préfet Rusticus reprit : « Bref, venons-en à notre sujet, à l’affaire qui s’impose et qui presse. Mettez-vous donc d’accord et, tous ensemble, sacrifiez aux dieux. » Justin répondit : « Aucun homme de bon sens ne peut abandonner la piété pour tomber dans l’impiété. — Si vous n’obéissez pas, vous serez cruellement châtiés. »

Justin répliqua : « C’est tout ce que nous désirons : être sauvés en étant châtiés à cause de notre Seigneur Jésus Christ, car c’est cela qui nous donnera salut et assurance devant un tribunal bien plus redoutable, celui où tout l’univers sera jugé par notre Seigneur et Sauveur. »

Les autres martyrs déclarèrent pareillement : « Fais ce que tu veux. Nous sommes chrétiens et nous ne sacrifions pas aux idoles. »

Le préfet Rusticus rendit la sentence : « Ceux qui n’ont pas voulu sacrifier aux dieux et se conformer à l’ordre de l’empereur seront emmenés pour être flagellés et subiront la peine capitale selon les lois. »

Les saints martyrs, glorifiant Dieu, se rendirent au lieu ordinaire des exécutions, furent décapités et consommèrent ainsi leur martyre en confessant notre Sauveur.

Catéchèse du pape Benoît XVI sur saint Justin, en 2007

Chers frères et sœurs,

Au cours de ces catéchèses, nous réfléchissons sur les grandes figures de l’Eglise naissante. Aujourd’hui, nous parlons de saint Justin, philosophe et martyr, le plus important des Pères apologistes du II siècle. Le terme « apologiste » désigne les antiques écrivains chrétiens qui se proposaient de défendre la nouvelle religion des lourdes accusations des païens et des Juifs, et de diffuser la doctrine chrétienne dans des termes adaptés à la culture de leur époque. Ainsi, chez les apologistes est présente une double sollicitude:  celle, plus proprement apologétique, de défendre le christianisme naissant (apologhía  en  grec  signifie précisément « défense »), et celle qui propose une sollicitude « missionnaire » qui a pour but d’exposer les contenus de la foi à travers  un  langage  et  des catégories de pensée compréhensibles par leurs contemporains. LIRE LA SUITE…